A la Une, au Nigeria, la mort d’un homme qui appartenait à tout le monde, et à personne
Ce sont avec ces mots célèbres de Muhammadu Buhari que le Guardian rend un ultime hommage à l’ancien président, décédé hier, dimanche, à 82 ans. L’ex-chef d’État était « une figure centrale dans l’évolution militaire et démocratique du pays », juge le quotidien. D’abord soldat, chef de guerre, gouverneur militaire puis putschiste avant, vingt ans plus tard, de devenir président… Sa mort « annonce la fin d’un chapitre de l’histoire politique du Nigeria, » renchérit le Vanguard, un chapitre marqué « par la dualité de son service, d’abord en tant que chef d’État militaire entre 1984 et 1985, puis en tant que président démocratiquement élu, » entre 2015 et 2023. Et cette contradiction, selon le Sun, définit en réalité toute la vie de l’ancien chef d’État, « dont l’héritage est puissant bien que controversé. » Les uns, poursuit le quotidien, « saluent son intégrité, sa discipline et son dévouement à l’unité du Nigeria. » Les autres, au contraire, « dénoncent les difficultés économiques, les inquiétudes concernant les droits humains, et les promesses non tenues. » Mais ce qui dérange surtout, selon le Guardian, c’est cette sévérité, sa « gouvernance rigide, et sa distance face aux levées de boucliers publiques, » pendant la crise « End SARS » (pour Special Anti-Robbery Squad, la brigade spéciale anti-braquage]contre les violences policières), en 2020. À lire aussiNigeria: la solidarité s'organise en ligne pour soutenir les manifestations Un président de plus en plus éloigné de la population Une distance illustrée par cette citation que reprend le Vanguard : « les jeunes nigérians veulent juste s’asseoir et ne rien faire. » Une remarque que la jeunesse a vue comme « minimisant leurs difficultés dans un climat économique difficile », rappelle le journal, et qui a « dévoilé la déconnexion générationnelle entre le pouvoir et la jeunesse, majoritaire », dans un pays où les deux tiers de la population a moins de 25 ans. En réalité, tance Le Monde Afrique, « son logiciel de pensée nationaliste semble usé, n’intégrant pas les aspirations » de jeunes Nigérians et Nigérianes que « Buhari ne parvient pas à comprendre, donc à satisfaire. » Autre facteur de division dans un pays aussi vaste qu’ethniquement riche, pour certains, l’ancien président est aussi coupable de « favoritisme envers les gens du Nord », dont il est lui-même originaire, écrit le Sun. Il faut dire, illustre le Monde, que l’ex-chef d’État avait pour habitude de confier « les postes les plus stratégiques, notamment sur le plan sécuritaire, à de vieux militaires originaires du nord. » Pour autant, depuis l’annonce de sa mort hier, de très nombreuses figures politiques du pays lui rendent hommage – car, conclut le Guardian, qu’il soit admiré ou détesté, « même ses opposants les plus durs l’admettent : [Muhammadu Buhari] a laissé une marque indélébile. » À lire aussiMuhammadu Buhari, ancien président du Nigeria, est mort à l'âge de 82 ans Un autre dirigeant du continent à la Une des journaux Le président camerounais Paul Biya, qui a levé le suspense hier, en annonçant sa candidature à la présidentielle du mois d’octobre. Il n’y a pas vraiment de surprise, c’était plutôt, juge Wakat Séra, un « faux suspense » après plus de 42 ans au pouvoir : il tient « le haut du podium des doyens des chefs d’État en exercice dans le monde. » Après tout, ironise le journal, « il n’est âgé que de 92 ans ! » Le chef d’État a déclaré, sur le réseau social X, ‘répondre à l’appel du peuple camerounais.’ D’autres candidats se sont, eux aussi, déclarés, mais « l’opposition peine à présenter un front uni, » souligne Jeune Afrique. Peut-être cette annonce présidentielle fera-t-elle office de moteur : elle « lance » en tout cas « la dernière ligne droite, » estime le magazine tandis que le Pays tient à « saluer le courage et la détermination de l’opposition qui mène un combat difficile, » face à un président qui donne l’impression d’avoir « fermé la porte et avalé la clé de l’alternance. » À lire aussiPrésidentielle au Cameroun: la certitude d'une candidature de Paul Biya fait divergence au sein du gouvernement